Divination et Vision juste (7/12)


Human­ité, bien com­mun
Ain­si dans « 見 大 人   jiàn   dà    rén     voir ; grand ; homme » c’est plutôt par “humain” que « 人 rén » devrait être traduit que par “homme”…

Cela per­me­t­trait au pas­sage d’é­carter l’a­mal­game avec la fig­ure mas­cu­line (homme ≠ femme), mais soulign­erait surtout la car­ac­téris­tique d’hu­man­ité : il ne s’ag­it pas ici d’un indi­vidu à dis­tance (un vieux sage, le yi jing (métaphorique­ment représen­té par “l’on­cle Li”), cumu­lant les tra­vers de la fig­ure sin­gulière, mas­cu­line, étrangère, expéri­men­tée et d’une étrange bien­veil­lance dés­in­téressée). […]

Divination et Vision juste (6/12)

Voir / grand / homme
“見 大 人   jiàn   dà    rén     voir ; grand ; homme” appa­rait 8 fois dans le Yi Jing, dont 7 précédées de la men­tion (man­tion ?) “利 lì prof­itable”.

Le point com­mun aux trois idéo­grammes est la clé “人 rén  homme “. Elle représente une per­son­ne vue de pro­fil. Cer­tains spé­cial­istes y voient un homme en marche, donc un être ver­ti­cal, droit sur ses deux jambes, en déplace­ment hor­i­zon­tal. Des formes prim­i­tives de la gra­phie pour­raient égale­ment représen­ter un per­son­nage en pos­ture de prière col­lec­tive ou de salu­ta­tion vers un autre. […]

Divination et Vision juste (4/12)

01

La pre­mière occur­rence du mot “voir” (見 jiàn) dans le texte du Yi Jing cor­re­spond au 1er mot du sec­ond  trait de hexa­gramme 01. Elle vient cepen­dant en écho et rime avec le 1er mot du 1er trait : 潛 qián “caché” . Lui-même vient en écho au 1er mot du Juge­ment, titre de l’hexa­gramme 乾 qiān “créatif” et se prononce presque de la même manière (le ton est toute­fois dif­férent). C’est le seul endroit du texte canon­ique où 潛 qián “caché” est employé.
潛   龍   勿   用    qián    lóng    wù    yòng     caché ; drag­on ; pas ; agir

qián

Cyrille Javary le traduit par “Tapi dans l’onde”, cer­taine­ment en par­tie pour soulign­er le car­ac­tère aqua­tique du drag­on asi­a­tique en con­traste avec le drag­on cracheur de feu occi­den­tal, mais tout à fait en accord avec l’é­ty­molo­gie du mot (il con­tient à gauche la clé de l’eau) et de nom­breuses pos­si­bil­ités de tra­duc­tion faisant référence à l’u­nivers aqua­tique. La par­tie droite du mot représente une épin­gle à chignon. Le sens est donc de retenir le débor­de­ment d’une vive flu­id­ité (une des tra­duc­tion désigne un vivi­er, un bar­rage de bran­chages pour retenir les ani­maux aqua­tiques). En médecine chi­noise tra­di­tion­nelle on désigne ain­si l’ac­tion de “cou­vrir” un yang trop fort afin de le réduire.

44

1er mot du 1er trait de l’hexa­gramme le plus yang, le plus écla­tant, nous avons cepen­dant bien le sens d’un masquage pro­vi­soire. La trans­for­ma­tion de ce trait con­duit à l’hexa­gramme 44, où il n’est donc pas sur­prenant de trou­ver au pre­mier trait : 見 凶  jiàn xiōng “vis­i­ble fer­me­ture”…

 

xiōng

Remar­quons au pas­sage que cette expres­sion est l’il­lus­tra­tion par­faite que 凶 xiōng “fer­me­ture”, (58 occur­rences dans le Yi Jing, tout de même) est à tort trop sou­vent traduit par “mal­heur, néfaste”… Mais cela aus­si sera pré­texte à d’autres arti­cles : le “mau­vais agence­ment du flux vital” n’est pas for­cé­ment nuis­i­ble !

 

zhuàng

Retenons pour le moment le car­ac­tère 壯 zhuàng “puis­sant, vigoureux” car­ac­térisant le Juge­ment de l’hexa­gramme 44 (女壯 nǔ zhuàng “femme ; fort”).

 

 

34

Le même mot appa­raît en titre de l’hexa­gramme 34 “Grande Force” ou le yang atteint la qua­trième place, débor­de de la pro­fondeur de l’hexa­gramme et se rend ain­si vis­i­ble au dessus de la sur­face. […]

Divination et Vision juste (3/12)

Une vision faible, lim­itée et défor­mée est une mau­vaise vision.

Une vision juste est donc puis­sante, large et exacte.

La puis­sance de la vision juste nous per­met de voir loin et avec clarté. Péné­trante, elle ne se heurte pas à la sur­face des choses et accède directe­ment à la vérité. Ce qui lui per­met d’aller loin et pro­fond c’est la vigueur de la présence de celui qui regarde. Nous savons déjà que la vision exige la présence d’un obser­va­teur : en son absence pas de vision ; donc plus grande est la présence de l’ob­ser­va­teur plus forte est la vision. Ain­si la capac­ité d’at­ten­tion, de con­cen­tra­tion énergique à l’in­stant présent con­fère à la vision sa puis­sance.

La vision juste embrasse un large champ de vision. […]

Divination et Vision juste (2/12)

La voie boud­dhiste de l’oc­tu­ple sen­tier se décom­pose en deux branch­es prin­ci­pales dont la pre­mière est toute entière dédiée à la Vision. La sec­onde branche est appelée …Trans­for­ma­tion et cor­re­spond aux sept autres sen­tiers (émo­tion, parole, action, moyens d’ex­is­tence, effort, prise de con­science et médi­ta­tion justes). Ain­si la Vision Juste est non seule­ment pre­mière dans le boud­dhisme, mais égale­ment tout par­ti­c­ulière­ment con­sid­érée.

La notion de philoso­phie est une con­struc­tion occi­den­tale. Le mot indi­en “darsana” qui a longtemps été traduit par “philoso­phie” provient d’un mot sig­nifi­ant “voir, ce qui est vu, per­spec­tive” et qui lorsqu’on le traduit par “com­préhen­sion” se réfère d’a­van­tage à l’ob­ser­va­tion atten­tive qu’à la rai­son. On traite donc ici de la dif­férence fon­da­men­tale entre l’ab­strac­tion occi­den­tale ‑la pensée‑, et l’ex­péri­ence directe ori­en­tale.

Le boud­dhisme con­sid­ère deux sortes de visions : la mau­vaise et la bonne ! La vision juste est définie comme le con­traire de la fausse… Il s’ag­it ain­si et tout d’abord d’une vision désen­com­brée de ses défauts.

La vision n’est jamais abstraite : il s’ag­it tou­jours de la vision de quelqu’un.  Dis­tin­guons donc deux sortes de per­son­nes : ceux qui ont une vision fausse et ceux qui ont une vision juste. La tra­di­tion boud­dhiste les nomme respec­tive­ment prthag­janas “les gens ordi­naires” et aryas “les êtres nobles”.

La ten­ta­tion est grande de rap­procher ces ter­mes de 小人 (xiǎo rén) et 大人 (dà rén), respec­tive­ment “l’être petit” et “l’être grand” de notre Yi JIng. 君子 “l’homme noble” ou “l’être accom­pli” de la Grande Image, lorsqu’il con­sid­ère les signes tri­gram­ma­tiques et s’en inspire pour rec­ti­fi­er sa con­duite et accom­plir l’ac­tion appro­priée (juste?) sem­ble bien emprunter le pre­mier chemin de l’oc­tu­ple sen­tier avant de met­tre en œuvre la trans­for­ma­tion…

Mais quelles sont donc les car­ac­téris­tiques d’une mau­vaise vision ? Elles sont au nom­bre de trois…

La mau­vaise vision :

Une mau­vaise vision est, pour com­mencer, une vision faible. Le regard de l’ob­ser­va­teur manque de puis­sance, d’én­ergie per­son­nelle. Sa portée ne s’é­tend donc pas très loin ou manque de dis­cerne­ment. La vision n’a pas la force de pénétr­er le monde et le “geste de voir” man­quant de vigueur ne s’ap­plique pas dis­tincte­ment. […]