Xuë wu : Le Yi Jing Noir (1/4)

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Xuë wu

Voici une méth­ode orig­i­nale d’in­tro­spec­tion per­son­nelle que nous décrirons plus loin. Elle est reliée au Yijing dans le cadre d’une étude du Tchan, en tant que pra­tique à part.

Elle a été trans­mise en langue française au tra­vers de l’en­seigne­ment d’un groupe­ment laïc boud­dhiste Tchan.

Cet enseigne­ment Tchan à visée libéra­trice par l’ex­péri­ence per­son­nelle a une orig­ine dans une zone géo­graphique de Chine. Il intè­gre deux voies, l’une usant de la réflex­ion, l’autre de pra­tiques ou d’ex­er­ci­ces dont cer­tains tirent avec cer­ti­tude leur orig­ine dans le Taoïsme chi­nois qui est inté­gré à cet enseigne­ment non dog­ma­tique.

En tant que méth­ode reliée au Yijing, elle présente la par­tic­u­lar­ité de se dégager totale­ment du texte du Yijing actuelle­ment con­nu et util­isé mon­di­ale­ment sous divers­es vari­antes approchantes.

Ce Yijing noir fait donc par­tie des usages du Yijing sans texte, ou avec texte autre que le doc­u­ment tra­di­tion­nel actuel. Il n’en­vis­age pas une con­sul­ta­tion de forme orac­u­laire « ou tirage », ni ne per­met de pos­er une ques­tion pour en saisir l’am­biance vis­i­ble et invis­i­ble.

Les ver­sions du Yijing de cette caté­gorie sont assez nom­breuses et moins con­nues. Elles se trou­vent totale­ment soumis­es à une trans­mis­sion directe entre usagers. Elles ont une nature extrême­ment expéri­men­tale. En effet on ne peut aller chez son libraire pour acheter un Yijing noir. Quant à en avoir un usage appro­fon­di, il est req­uis de suiv­re l’en­seigne­ment Tchan pour entr­er dans son ambiance spé­ci­fique. Dans ce cadre elle respecte « l’idée » de la tra­di­tion clas­sique, se relie au nom­bre 64 sous la forme de 64 propo­si­tions. Son nom chi­nois Xuë Wu.

LA METHODE EXTERNE D’UTILISATION

Le Xuë wu se pra­tique selon deux modes : la médi­ta­tion du hibou ou la pêche de la pan­thère. Une méth­ode interne d’u­til­i­sa­tion con­cerne les pra­ti­quants de l’é­tude du Tchan. Une autre externe, celle qui va suiv­re, peut être util­isée par ceux qui ne suiv­ent pas cet enseigne­ment spé­ci­fique :

MEDITATION DU HIBOU

Sur une branche, le hibou médite sur ses fautes passées, assas­sin de souris pour sur­vivre, alors que ses pro­pres petits geignent au nid atten­dant de nou­velles proies à gob­er.

Le pra­ti­quant lit, l’une après l’autre, les 64 propo­si­tions, puis médite sur celles-ci sur le thème de : EN QUOI JE — CONCERNE- PAR TEXTE — LU.

Note : cette for­mu­la­tion petit nègre fait ressor­tir à la chi­noise la façon d’agir et de se plac­er dans une telle médi­ta­tion. L’une des médi­ta­tions boud­dhistes basique se pra­tique en lais­sant les pen­sées fil­er sans s’at­tach­er à aucune d’en­tre elles comme des nuages glis­sant dans le ciel de notre esprit. Et dans ce cas excep­tion­nel de la médi­ta­tion du hibou on laisse par­fois aller cette pen­sée à son terme évo­lu­tif avant de pass­er à autre chose. Cha­cune des 64 propo­si­tions peut ain­si être l’ob­jet d’une médi­ta­tion d’une minute au plus.zeus Xuë wu

LA PECHE DE LA PANTHERE

Elle tapote de la pat­te à la sur­face des eaux. Les pois­sons qui imag­i­nent la chute d’une nour­ri­t­ure dans l’eau remon­tent et se font alors hap­per. Le pra­ti­quant lira les 64 propo­si­tions, mais usera d’une médi­ta­tion éclair sur cha­cune d’en­tre elles, en ten­tant d’amen­er à la sur­face de son esprit un « sou­venir per­du » reliant cha­cune des propo­si­tions à un inci­dent de son pro­pre passé :

RECHERCHE D’UNE VISION SENSATION ECLAIR


Xuë wu : 1ère PARTIE du texte

1 — Peut-être avez-vous souhaité avoir des enfants ? Si oui, exam­inez les raisons de ce souhait dans leur total­ité. Sinon, exam­inez aus­si vos raisons.

2 — Sans égoïsme, vous vous êtes inquiété, attristé pour autrui. Vous vous êtes mis à sa place, vu à sa place, vous étiez sur le moment, cette autre per­son­ne.

3 — Avez-vous eu peur de l’avenir ? Si oui, vous avez, à coup sûr, pris des pré­cau­tions en fonc­tion de ce que vous ont ensei­gné vos expéri­ences passées. Sou­venez-vous des heureux résul­tats de ces pré­cau­tions.

4 — Vous avez don­né de bons con­seils. Ce faisant vous étiez quel­qu’un d’im­por­tant. Et d’une telle bon­té !           

5 ‑Tous s’af­fo­laient, sauf vous. L’in­ca­pac­ité d’a­gir, dic­tée par le désar­roi n’é­tait pour rien dans votre atti­tude. Peut-être, par la suite, l’avez-vous fait remar­quer ?

6 — Esprit juste, mais car­ac­tère vif, vous vous êtes lais­sé entraîn­er dans des querelles. Mais vous aviez tou­jours, de votre point de vue du moment, entière­ment rai­son. Ou presque entière­ment. Sou­venez-vous.           

7 — Vous avez com­mis des actes que la malveil­lance pour­rait qual­i­fi­er de cru­els. En fait, vos actes étaient jus­ti­fiés. Vous avez pen­sé cela. Vous le pensez encore ?

8 — Serait-il pos­si­ble que vous ayez calom­nié autrui ? Non, vous avez émis des cri­tiques con­struc­tives. Il n’est, pour en avoir la cer­ti­tude, que de vous sou­venir.2048 Xuë wu

9 — Celui (ou celle) qui avait, jusque là, paru vous mépris­er, vous a dis­tin­gué entre tous. Vous avez éprou­vé une recon­nais­sance dénuée de bassesse.

10 — Vous avez man­i­festé à l’é­gard d’autrui et alors que vous vous trou­viez en posi­tion dom­i­nante, une bon­té dépourvue de toute affec­ta­tion de supéri­or­ité. Sou­venez-vous de vos pen­sées et de vos sen­sa­tions d’alors.

11 — On vous a humil­ié. Tout à fait gra­tu­ite­ment… A votre avis actuel ?

12 — Vous alliez vous met­tre en colère, a‑t-on pen­sé. Eh bien non, vous avez gardé votre sang-froid et le sourire. A l’intérieur : Calme aus­si, paix et man­sué­tude ?

13 — Appar­tenant à l’e­spèce humaine, vous n’êtes pas, bien sûr, d’une inno­cence totale. Pour­tant (mais voyons !), il y a en vous moins de vile­nie qu’en la plu­part des humains. D’où, peut-être, une cer­taine méfi­ance à pri­ori vis-à-vis des « autres » si peu frater­nels ?

14 — Comme l’air, et à peine moins, l’ar­gent est néces­saire dans la société des hommes. Il vous est arrivé de crain­dre le manque d’ar­gent (vous méprisez peut-être la richesse, mais néces­sité fait loi). Vos craintes ont fait naître en vous la sagesse. Vous n’avez donc plus à crain­dre le manque d’ar­gent grâce aux pré­cau­tions pris­es ?

15 — Peut-être vous est-il arrivé de dire de vous plus de bien qu’il n’y en avait vrai­ment à dire ? Ou peut-être avez-vous sim­ple­ment lais­sé enten­dre qu’il con­ve­nait de penser beau­coup de bien de vous ? Vos Paroles ont été per­dues car, égoïstes, « les gens » se soucient peu de ce qu’est, ou n’est pas, un autre qu’eux-mêmes. Mais vous, jusqu’à quel point avez-vous cru vos pro­pres paroles ?

16 — Pren­dre des risques inutiles est fou. N’est-il pas nor­mal, dans ces con­di­tions, que vous ayez par­fois ten­té de faire jus­tice (la malveil­lance dirait : de nuire) sans risque ?

CRÉDITS IMAGES (DANS L’ORDRE D’AFFICHAGE) : Wildlife Learning Center / Charlie Burlingame

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