Roman ou pas roman ?
Au cours de la correspondance qui a précédé la rédaction de la présentation de “Moi, Confucius”, Alain a été intrigué par l’étiquette “Roman” accolée par l’éditeur à cet ouvrage.
Jean Levi, grand spécialiste de Tchouang Tseu et de Confucius, a lui aussi dédié un premier livre à Maître Kong sous forme de roman “Le Rêve de Confucius”, et publié plus récemment un essai fort brillant mais sobrement intitulé “Confucius”. Ces deux titres sont bien sûr tous deux référencés dans notre Bibliographie.
A propos du dernier livre de José Frèches, voici reproduit le contenu de notre échange :
Alain :
Sur le site de Xo l’éditeur l’ouvrage est classé dans la catégorie “Romans”. Penses-tu qu’il s’agit d’une biographie au sens historique, d’une biographie romancée, d’un roman, d’un traité de sagesse s’appuyant sur l’interprétation de la vie de Kǒng Fū Zǐ ? Cela serait important pour nos lecteurs de savoir s’il s’agit ou non d’une référence historique ou si des libertés (louables bien entendues) ont été prises dans le récit…
Isabelle :
Biographie au sens historique : que sait-on de la vie de Confucius dans la mesure où la première biographie de Confucius date de 3 siècles après sa mort !
Biographie romancée : pour romancer une biographie il faut pouvoir s’appuyer sur une biographie fiable.
Traité de sagesse s’appuyant sur l’interprétation de la vie de Kǒng Fū Zǐ : cela aurait pu décrire cet ouvrage, mais son auteur, en le mettant dans la catégorie de « roman », a volontairement pris une autre option, celle d’un récit simple, accessible à tous dont le but n’est pas le traité de sagesse, mais le combat d’un homme qui cherche à partager et appliquer ses idées.
Roman, n’a donc pas été choisi à la légère, bien au contraire, car c’est sous la forme ludique d’un roman écrit à la première personne que l’on se familiarisera avec ce que l’on appelle aujourd’hui « la pensée confucéenne ».
En cela, c’est une approche très « chinoise » qu’adopte José Frêches lorsqu’il fait le choix de présenter son livre sous la forme d’un roman : il évite certes les querelles d’experts, mais surtout, vulgarisant et humanisant son récit, il le rend accessible et compréhensible à tous. Ainsi l’appellation « roman » permet de le lire comme un roman mais il y a d’autres niveaux de lecture qui satisferont les passionnés de cette époque. Cela n’est pas sans rappeler le goût ancestral de protéger les pensées les plus profondes derrières de petites anecdotes quotidiennes, animalières ou rurales que l’on retrouve tout au long du Yi Jing.
Alors, références historiques ou liberté ? Les sources principales sont « les entretiens » et le cadre historique d’alors. Les libertés sont la mise à jour de certaines contradictions dues à des rajouts.
Mais au fait qui a parlé de « roman » ? L’éditeur ? Il a dû oublier de lire la toute première ligne de l’avertissement au lecteur : “Le texte qui va suivre n’est ni un essai, ni un roman, mais plutôt un petit manuel de sagesse à l’usage de tout un chacun”…
…Merci José Frèches, nous avons notre réponse !
Moi, Confucius – Extraits
- “Parler aux bêtes sauvages et aux oiseaux n’est pas la solution…Si on veut faire bouger les choses dans ce bas monde, il faut bien accepter de parler à ses semblables.” (Chapitre 34)
- “On dit souvent que les fous du roi ont des avis plus pertinents que les lettrés expérimentés et que les rois sans fous sont les plus dérangés. Après tout, peut-être cet illuminé avait-il raison de me mettre en garde, en raillant ma prétention à vouloir sauver le monde de lui même.” (Chapitre 35)
- “En somme, dans le monde du yin et du yang, du creux et du plein, de la vacuité et de la densité, je n’ai rien fait d’autre qu’apporter ma petite pierre à l’édifice des principes
universels.” (Postface)
Moi, Confucius – José Frèches (1/2)
Isabelle Kriegel est membre de Djohi Beaulieu et artiste peintre à Nîmes et Barcelone. Sur son site https://www.isabellekriegel.com/ vous trouverez entre autres une série de photos dédiées au livre, prises au Musée National d’Art de Catalogne (Barcelone).