Xuë wu : Le Yi Jing Noir (4/4)
Libre accès ?
La richesse de ce texte et de ses propositions apparaît évidente à qui a creusé honnêtement et patiemment l’étude du Yijing. Son utilisation incite à une mise en mouvement de quelque chose d’instinctif ou de subconscient en nous. Dans le cadre du bouddhisme Tchan, l’utilisateur pratique cette expérience sous la conduite de son Maître.
Sans Maître peut être est-il utile d’être prêt, ou préparé. La formulation proposée dans ces 4 articles ne saurait être recommandable telle quelle aux personnes déséquilibrées.
Pour autant il nous a semblé important que ce texte soit accessible librement, parce que son objet n’a pas une nature dangereuse, au contraire , il vise à nous amener à l’harmonie. Simplement se creuser les méninges sur certaines de nos culpabilités peut être un peu dérangeant pour l’ordre habituel de notre intériorité. Dans une période de vie instable mieux vaudrait s’abstenir de pratiquer le Xuë wu.
Sans sectarisme, il peut être un matériau expérimental valable pour qui souhaite accéder à plus de sagesse. Il est probable que la traduction a été orientée à l’intention de personnes actuelles de nos sociétés occidentales, et qui trempent dans notre fond culturel judéo chrétien.
Hibou et Panthère dans le Yijing classique
Relier ces 64 propositions au Yijing classique n’est pas le propos de ce Yijing noir. S’il s’inspire du Yijing classique, il le détourne pour une fin éminemment semblable à celle de l’œuvre à laquelle ont participé tous ceux qui ont apporté dans l’ombre leur pierre à cet édifice majeur de la culture chinoise. Le Tchan laïc utilise ainsi à sa manière propre le thème du Yijing et son fond situationnel découpé en 64 registres archétypaux qui lui servent de prétexte et de trame.
Les usagers du Yijing classique remarqueront que le Hibou, et la Panthère, sont présents dans la tradition et le texte du Yijing classique.
Le hibou prend place au niveau de l’hexagramme 20 REGARDER, dont l’idéogramme Guan a pour partie gauche un dessin apparenté au hibou, animal fétiche des chamanes, parce qu’il a le pouvoir merveilleux de voir dans la nuit, donc dans l’invisible.
La panthère est citée plusieurs fois dans le texte le plus classique du Yijing en tant qu’animal sauvage, prédateur usant préférentiellement d’une stratégie de chasse à connotation Yin, d’attente. Elle tombe simplement d’au-dessus sur sa proie depuis une branche d’arbre. Elle est souvent comparé sur ce plan à cet autre prédateur majeur qu’est le tigre. Lui se déplace pour chasser, n’attendant pas sa proie du haut d’une branche, en usant d’une stratégie de nature plus Yang.
Xuë wu : 4ème PARTIE du texte
Dans la PRATIQUE de la MEDITATION du HIBOU ou de la CHASSE de la PANTHERE :
utilisez les 16 propositions suivantes de 49 à 64 selon la méthode décrite au volet 1 du Xuë Wu
49 – Si, au cours d’une discussion, vous avez été en désaccord avec votre interlocuteur, c’était parce que, objectivement, ses arguments étaient indéfendables. Et nullement parce que l’un et l’ autre soutenaient deux points de vue subjectifs basés sur des systèmes de valeurs différents.
50 – Vous avez montré de la générosité. L’idée que votre geste vous donnait de l’importance n’était pour rien dans votre attitude ?
51 – Vous avez agi pour le bien d’ autrui, heureux et fier, la conscience sereine. Si, par la suite autrui a pâti ou cru pâtir de votre action, n’est-il pas un égoïste geignard ?
52 – Peut-être n’avez-vous jamais tué personne ? Peut-être n’êtes vous pas de ceux qui tuent, même en pensée. Car si la haine avait été en vous, forte à ce point-là, vous vous souviendriez. Vous souviendriez-vous ?
53 – La fidélité est, en tout domaine, une belle vertu. Fidélité en amitié, en amour, fidélité, surtout à soi-même. Belle vertu à laquelle vous n’auriez su manquer, en pensées ou en actes.
54 – ” La main qui guide doit être ferme “. Il est bien évident que, s’ il vous est arrivé d’être plus dur pour vos proches que pour l’étranger, c’était dans un but éducatif, nullement par lâcheté.
55 – Il est humain de mépriser ce qui est méprisable, de rire de ce qui est ridicule. Mais pourquoi des têtes creuses vous ont-elles moqué ? N’auraient-elles rien d’humain ?
56 – La vie est un voyage .Y aurait-il des étapes longues, brèves, ou très brèves, de votre voyage, que vous ne voudriez faire connaître d’ autrui à aucun prix ? .
57 – Tout lui réussissait et tout a mal fini. Vous n’avez, certes, ressenti aucune joie à son échec final. Et pour tout autre, il en était de même, n’est-ce, pas ?
58 – Tout sentiment est valable en son temps. Vous Souvenez-vous de gens qui manifestaient une gaieté odieuse dans des circonstances tristes pour vous ?
59 – Lorsque vous évoquez l’image que vous essayez de montrer à autrui, êtes-vous bien sûr de montrer l’image que vous voyez vous-même ? Et cette image n’ est-elle pas, elle-même, en train de perdre la netteté de son contour ?
60 – ” Un petit filet ne peut retenir un gros poisson “. Ne vous serait-il pas arrivé d’aventure, de promettre plus que vous ne pouviez tenir ?
61 – Par bonté, par politesse ? l’être humain est parfois obligé de mentir à autrui. Et à lui-même ?
62 – N’avez vous pas remarqué que, d’un certain point de vue, votre intérêt est plus important que celui de la collectivité ?
63 – La mort et le soleil ne se regardent pas en face. Mais comment pourrait-on regarder la mort, simple absence ?
64 – N’avez-vous jamais eu l’impression que votre destin, c’est vous-même ? Et que tout est bien ainsi ?
COMMENTAIRE final de l’Ecole Tchan, ou d’un de ses instructeurs :
Un adage dit que plus un être humain approche de ” l’éveil ” plus les jian-yi du xüe wu lui semblent exprimer la plus simple évidence.
Nos instructeurs – sauf exception rarissime, – vous ont mis en garde contre toute hâte. Par conséquent, le présent texte ne doit être lu que par des personnes assez proches de ” l’éveil “. Donc la plupart des propositions que vous venez de lire doivent déjà, avoir pour vous quelque chose de familier.
Pour le dernier d’entre eux, par contre, un commentaire ne sera pas inutile.
N’avez-vous jamais eu l’impression que votre destin, c’est vous-même ? Et avez-vous jamais eu l’impression qu’il est bien qu’il en soit ainsi ?
Ce dernier jian-yi correspond au dernier ” gua ” du Yi-King, 64 Wei Tsi, ” avant l’accomplissement “. Il condense, en quelque sorte, l’ensemble des implications du xüe vu. Sa signification est : tout ce qui a été, est, sera, est l’expression de la nécessité. Qui a compris cela a compris que le ” devenir ” est un vain fantôme, que du simple fait ” d’accepter ce qui est et doit être “, le samsara, l’illusion se dissipe, que ses traîtres vagues se fondent et qu’ apparaît, en lieu et place, le nirvana, le réel. Selon un Poète taoïste : l’homme voit alors que le désordre apparent est, en fait, l’ordre réel et que, de toute éternité, l’homme a été d’accord avec la nécessité de cet ordre…
Xuë wu : Le Yi Jing Noir (3/4)