Xuë wu : Le Yi Jing Noir (3/4)

par

Expérimentation ou avidité ?

LE LECTEUR pour­rait s’empresser de lire avec une avid­ité intéressée les propo­si­tions qui suiv­ent dans ce 3ème volet du Xüe wu. Mais ceci n’est pas un texte, ni un livre, mais un PROGRAMME D’EXPERIMENTATION SUR SOI-MEME.

Si vous n’êtes pas unique­ment intéressé par le côté cul­turel de ce Yijing noir, je vous recom­mande de ne pas lire la suite, avant d’avoir expéri­men­té en pra­tique les deux pre­mières par­ties du Xüe wu.

Expérience

L’or­gan­i­sa­tion des 64 propo­si­tions a été effec­tuée dans le groupe­ment Tchan d’une façon sub­tile­ment élaborée, et mûre­ment réfléchie. Elle vise à nous faire pren­dre con­science du fait que cer­taines valeurs socié­tales ou humaines que nous croyons nor­males ne le sont pas, et que d’autres mérit­eraient une esti­ma­tion mit­igée.

Le Xuë wu, je le con­firme, peut aider à se con­necter au noy­au essen­tiel de l’être : le cœur, l’âme. Il n’a pas la pré­ten­tion d’être une méth­ode com­plète, encore moins pour un pra­ti­quant isolé.

La pra­tique au sein du groupe­ment Tchan présente quelques dif­férences avec les propo­si­tions réservées aux pra­ti­quants non mem­bres. Elle s’é­tale sur 64 jours, et présente à la fois un tra­vail immé­di­at (pan­thère) et aus­si un autre plus lente­ment réfléchi (hibou).

L’ex­péri­ence de la pra­tique du Xuë wu, par une sorte d’ex­er­ci­ce intel­lectuel pro­duit des effets qui rejoignent les grands thèmes de l’é­cole laïque du Tchan. C’est un exer­ci­ce déroutant qui met face à son masque si l’on en porte un, ou à ses masques s’ils sont inter­change­ables. Et si l’ex­péri­ence révèle que vous n’en avez plus aucun parce que vous avez net­toyé à votre porte (et der­rière elle votre intérieur), vous risquez encore la décon­v­enue de l’ego qui se com­plaît dans sa pro­pre réus­site.

Par­mi les autres pièges qui peu­vent nous induire sur une fausse piste lors de cette pra­tique, j’ai aus­si remar­qué que nous sommes par­fois porté à juger plutôt qu’à observ­er et ressen­tir ce qui remonte de notre ombre. Et lorsque par­fois rien ne vient tit­iller notre con­science suite à une des propo­si­tions, il arrive que le rêve de la nuit suiv­ante apporte le matéri­au absent, parce que trop enfoui, ou peu accept­able, ou telle­ment évi­dent…

Expérience personnelle

g expérienceJ’ai choisi de pra­ti­quer la pêche de la pan­thère afin d’être en mesure de décrire ses effets dans ce volet 3 du Xue wu. J’ai d’abord été dérouté, puis j’ai trou­vé la mesure d’un fonc­tion­nement spon­tané et révéla­teur de moments impor­tants et con­struc­tifs de mon his­toire per­son­nelle. Revis­iter ces temps de mon passé, à l’am­biance un peu ten­due, et qui ont impliqué des choix et des actes, enclenche facile­ment une réflex­ion immé­di­ate, mais longue à con­stru­ire si on la laisse se dérouler. La brièveté de l’ex­péri­ence médi­ta­tive pro­posée dans l’in­stant présent pour la voie de la pan­thère ne per­met pas de réfléchir, et oblige à être plus instinc­tif. Le décalage entre la sit­u­a­tion remé­morée et le temps présent a des con­séquences. On en vient à cern­er l’essen­tiel. J’ai été par­ti­c­ulière­ment touché par le fait que, au passé comme au présent, j’ai dû réa­gir instan­ta­né­ment, à par­tir de mes ressen­tis et de mon his­toire, là où elle en était au présent actuel ou passé de ma vie. Une des ver­tus du Xüe wu et du Tchan est de met­tre en avant cet instant présent, qui ne cesse jamais.

 

 

 

 


Xuë wu : 3ème PARTIE du texte

Dans la PRATIQUE de la MEDITATION du HIBOU ou de la CHASSE de la PANTHERE : utilisez les 16 propo­si­tions suiv­antes de 33 à 48 selon la méth­ode décrite au volet 1 du Xuë Wu

33 — Vous avez aban­don­né une dis­cus­sion parce qu’elle était stérile, parce que la parole de bon sens ne con­va­inc pas, par dig­nité. Mais non parce que vous aviez « per­du la face » ou craig­niez de la per­dre.

34 — Vous avez volon­taire­ment appuyé sur une dent qui vous fai­sait mal. Ceci doit être pris au sens fig­uré, c’est une image. Sou­venez-vous.

35 — Vous avez aidé autrui. Le résul­tat (de votre acte) a été bon. Et la suite de ce résul­tat ?

36 — Vous avez, à plusieurs repris­es, souf­fert physique­ment. Dans les moments de rémis­sion de la douleur, vous est-il arrivé de penser, de dif­férentes façons, aux autres qui ne souf­fraient pas – eux !

37 — Il vous est arrivé, devant des étrangers, de défendre vos proches, par­ents et amis. Parce que, bien enten­du, vous les aimez — qu’ils aient rai­son ou tort — et nulle­ment parce que, ce faisant , vous vous défendiez un peu vous-même.

38 — Le nom­bre, c’est la médi­ocrité, la majorité, c’est la sot­tise. Vous vous êtes trou­vé en désac­cord avec des représen­tants de la « masse » et vous avez défendu une opin­ion bien per­son­nelle. Quelle a été, par la suite, la sta­bil­ité de cette opin­ion en vous ?­

39 — Mais il arrive mal­gré tout que l’élite influ­ence la « masse » et que, par­fois, l’homme du com­mun s’ex­prime comme « le sage » car « la per­le peut repos­er au fond de l’auge ». Vous est-il arrivé d’ac­cepter une vérité com­mune sans l’ex­péri­menter per­son­nelle­ment. Avez-vous « poussé le cri du loup avec la horde ? » Vous est-il arrivé, en un mot, de faire vôtre, une opin­ion ne reposant sur aucune expéri­ence per­son­nelle ?

40 — A votre avis, un, être humain peut-il appartenir à un autre ? Avez-vous, sur ce point, expéri­men­té per­son­nelle­ment ? dans un sens ou dans l’autre ?

HsQM7Jd2Qlysfyk9SgvX_logarska-valley-5 expérience41 — La plu­part des humains regret­tent le « temps qui passe » la fuite de leur jeunesse, la venue de la vieil­lesse et de la mort…Ne serait ce pas qu’ils pensent,- ou sen­tent — que ce « temps qui passe » a été mal employé par eux ?

42 — Si vous pou­viez recom­mencer votre exis­tence en con­ser­vant le sou­venir de vos expéri­ences passées : vous évi­teriez toutes les erreurs com­mis­es. Donc, tout irait mieux ?

43 — Et, retrou­vant l’in­stant présent, vous ne con­naîtriez plus aucune crainte, aucune angoisse pour l’ avenir…

44 — Ne vous est-il jamais arrivé, excep­tion­nelle­ment, de pren­dre le par­ti du fort con­tre le faible ? Le sec­ond avait tort, qu’y faire ? Pou­vez-vous retrou­ver, dans votre mémoire, quelque cir­con­stance excep­tion­nelle de ce genre ?

45 — Il vous est arrivé, par erreur due à une infor­ma­tion insuff­isante, d’émet­tre sur autrui des juge­ments sévères et erronés.. Mais autrui a agi de même à votre égard, par légèreté coupable. Vous sou­venez-vous de ceci ? Et de cela !         

46 — Vous avez tou­jours vu le suc­cès d’autrui sans éprou­ver la moin­dre jalousie. Au con­traire…

47 — Ne serait-il pas pos­si­ble que, quelque jour, des gens malveil­lants aient insin­ué que vous aviez lais­sé vos respon­s­abil­ités à autrui ?…    .

48 — Vous avez évité les générosités déplacées qui, dans cer­tains cas, engen­drent la paresse. Ce sont là des sou­venirs que l’on évoque avec sat­is­fac­tion.

Xuë wu : Le Yi Jing Noir (2/4)

Xuë wu : Le Yi Jing Noir (4/4)

CRÉDITS IMAGES (DANS L’ORDRE D’AFFICHAGE) : Bibliothèque personnelle / tom Dean / ales krivec