“Au temps du repos, l’homme de valeur con­sid­ère les signes et appré­cie les textes ; au temps de l’ac­tion, il con­sid­ère les change­ments et appré­cie la con­sul­ta­tion.”
(For­mules annexées du Yi Jing)

Nous lim­i­tant au proces­sus de la con­sul­ta­tion, je pro­pose de con­sid­ér­er ici l’acte div­ina­toire comme la suc­ces­sion de 8 temps dis­tincts faisant cha­cun appel à des com­pé­tences ou des con­cep­tions bien dif­férentes.

Le Yi Jing ne peut en effet pas être réduit à un sys­tème un peu mag­ique, ni assim­ilé à lottery-146318_1280l’urne d’une loterie, dans laque­lle il suf­fi­rait d’in­tro­duire une ques­tion pour obtenir en retour une réponse “tirée au hasard” :
Au cours de cha­cune des phas­es décrites ci-dessous la par­tic­i­pa­tion, le “tra­vail” du con­sul­tant sont req­uis : de fait, dès la pre­mière étape, la for­mu­la­tion de la ques­tion néces­site un effort ou une réflex­ion pour devenir “accept­able”. Con­crète­ment on finit par s’apercevoir que cha­cune des étapes, y com­pris la sec­onde inti­t­ulée “Le hasard”,  provoque un for­matage, une ori­en­ta­tion qui ren­dent cette expéri­ence finale­ment tout sauf hasardeuse.

Mieux encore, la suc­ces­sion de ces “plis” fait davan­tage ressem­bler l’acte div­ina­toire à une chaîne de pro­duc­tion (presque une usine !) où la matière “trans­for­mée” serait la com­préhen­sion de celui qui pose la ques­tion. Ain­si le tra­vail “du” con­sul­tant, tout d’abord envis­agé comme témoin pas­sif d’un proces­sus, puis acteur, opéra­teur de cette alchimie, devient le tra­vail “du” con­sul­tant en tant que matéri­au, en tant qu’ob­jet cen­tral de la trans­for­ma­tion.

Les 8 étapes de ce tra­vail sont :

  1. Ques­tion,
  2. Hasard
  3. Cal­cul
  4. Traits
  5. Hexa­grammes
  6. Con­sid­éra­tions graphiques
  7. Inter­pré­ta­tion des textes
  8. Réponse.

Etape 1 : La ques­tion

Il peut s’a­gir d’une ques­tion pré­cise, d’une prob­lé­ma­tique ou d’une sit­u­a­tion pour laque­lle on con­sulte le Yi Jing.
Une ques­tion fer­mée, atten­dant par exem­ple une réponse de type “oui ou non” n’ob­tien­dra en général “que” la refor­mu­la­tion du prob­lème con­sid­éré…
Nous trou­vons par con­tre dans les pre­miers rap­ports his­toriques d’o­r­a­cle par le yi jing l’ap­proche sug­gérée pour résoudre ce type d’in­ter­ro­ga­tion : “La ques­tion dou­ble”. Ain­si le dilemme au sens théa­tral “Dois-je acheter ce ter­rain ?” devient un dilemme au sens éty­mologique (grec δί-λημμα ou dilem­ma « dou­ble propo­si­tion ») “Ques­tion A : Qu’en sera t’il si j’achète ce ter­rain ?” + “Ques­tion B : Quelles con­séquences si je n’achète pas ce ter­rain ?”. L’aide à la déci­sion ain­si apportée ne se con­tente pas de choisir pour le con­sul­tant la meilleure voie, mais révèle les poten­tiels en germe dans deux straté­gies apparem­ment opposées. Il y a donc dès ce stade, même si l’on s’en tenait là, une invi­ta­tion ferme à mod­i­fi­er son point de vue, une “trans­for­ma­tion” induite chez le con­sul­tant.

150px-Jean_Dodal_Tarot_trump_06Il est d’autre part couram­ment con­venu de ne pas con­sid­ér­er le Livre des Trans­for­ma­tions comme un moyen de ren­seigne­ment “hors-sujet”, c’est‑à dire à pro­pos d’un domaine dans lequel le ques­tion­neur ne serait pas directe­ment impliqué, donc pas “sujet”. Ain­si, aus­si préoc­cu­pante qu’elle puisse paraître, la ques­tion “Mon mari a‑t’il une aven­ture avec ma meilleure amie ?”, n’est pas légitime pour le yi jing puisque, mal­gré les très forts liens intimes entretenus avec les deux per­son­nes men­tion­nées, le ques­tion­neur, le “je”, n’est pas directe­ment impliqué dans l’énon­cé …qui relève donc de l’indis­cré­tion, mais surtout ne per­met pas de déduire une action.

Nous con­sta­tons donc qu’ain­si dès la pre­mière étape, le yi jing, avant même que le hasard ne soit con­vo­qué et inter­prété, avant même que des posi­tion­nement stratégiques aient été déduits “répond” déjà à sa mis­sion de “Livre des Trans­for­ma­tions”. Il advient même dans cer­tains cas que la ques­tion claire­ment posée se révèle un dénoue­ment et devi­enne la réponse “en soi”.

Dans les cas les plus fréquents où cela n’est pas suff­isant, le sourire, l’ex­pres­sion de soulage­ment ou la dynamique qui ani­ment le con­sul­tant lorsqu’il ressent la ques­tion “juste et vivante” sont la preuve que le tra­vail a com­mencé et que l’on peut et doit sans plus atten­dre pass­er aux étapes suiv­antes.

Les prochains arti­cles mon­treront étape par étape com­ment ce for­matage, ce mod­e­lage s’ap­plique méthodique­ment suiv­ant des axes et à des niveaux très dif­férents et com­plé­men­taires, inclu­ant l’aléa­toire et “acces­soire­ment” la réponse…

Le Yi Jing : généra­teur aléa­toire de répons­es ? (2/6)

CRÉDITS IMAGES (dans l’ordre d’affichage) : Open Free Clipart / Domaine public (Tarot de Marseille, L’Amoureux).