Etape 2 : Le hasard (1/2)

Face à un13-02-27-spielbank-wiesbaden-by-RalfR-093e situa­tion pro­blé­ma­tique toute forme vivante col­lecte ou plu­tôt déter­mine les don­nées sem­blant en rela­tion avec la ques­tion, afin d’en déduire (à l’é­tape sui­vante) par un “cal­cul” le posi­tion­ne­ment ou l’ac­tion juste. Cela s’ap­plique au scien­ti­fique bien sûr, mais va (pour reprendre un exemple cher à Deleuze) jus­qu’à la tique qui sélec­tionne une suc­ces­sion de signes (1‑lumière, 2‑odeur, 3‑tactile) sem­blant pro­gres­si­ve­ment (1‑contexte favo­ri­sant, 2‑identification, puis 3‑détermination du geste juste au milieu juste) indi­quer l’op­por­tu­ni­té d’une proie.
“Déter­mi­ner” veut donc dire dis­cer­ner ce qui fait sens par­mi un ensemble de signes sans rap­port avec le sujet et donc bruit (infor­ma­tions inutiles).

Une for­mule usuelle chi­noise pour expri­mer la divi­na­tion par le yi jing est : 彖吉凶 tuàn jí xiōng. Les deux der­niers mots font par­tie des appré­cia­tions man­tiques les plus uti­li­sées dans le Livre des Trans­for­ma­tions et sont habi­tuel­le­ment tra­duites par “favo­rable” et “défa­vo­rable”. Le pre­mier carac­tère est celui uti­li­sé pour dési­gner le com­men­taire prin­ci­pal des hexa­gramme (le Juge­ment). Son sens cou­rant est effec­ti­ve­ment “déci­der, juger”. Par homo­pho­nie on peut l’as­so­cier avec tout un ensemble de mots signi­fiant “tran­cher, sec­tion­ner, divi­ser”. La divi­na­tion consis­te­rait donc à “Déter­mi­ner ce qui est favo­rable et ce qui n’est pas favo­rable”. Ety­mo­lo­gi­que­ment le carac­tère 彖 tuàn signi­fie “mar­cher” (en par­lant du porc). On peut donc aus­si choi­sir de le tra­duire par “fonc­tion­ne­ment sin­gu­lier” d’au­tant que le dic­tion­naire Ric­ci indique que le cha­pitre “Juge­ment” per­met diso­ler une situa­tion par­ti­cu­lière et sa ten­dance au sein de la muta­tion uni­ver­selle”.
Rap­pe­lons d’autre part que cer­taines tra­di­tions divi­na­toires ne basent pas la déter­mi­na­tion des hexa­grammes sur l’a­léa­toire mais sur l’ob­ser­va­tion du contexte et des élé­ments remar­quables (dates, obser­va­tion des élé­ments “natu­rels” pré­sents au moment du tirage (sons, cou­leurs, points car­di­naux, végé­taux, ani­maux, mais aus­si nombres d’élé­ments, fenêtres, per­sonnes, etc.).

Mais com­ment en est-on venu à déter­mi­ner par l’a­léa­toire ?
Lors de la sca­pu­lo­man­cie les traces de brû­lure étaient consi­dé­rées comme réponse de vali­da­tion ou refus du sacri­fice aux esprits. Il n’y avait donc à ce stade pas d’a­léa, mais constat de cer­taines consé­quences du geste sacri­fi­ciel.
Conser­vant le prin­cipe de la brû­lure sur os, mais aban­don­nant le sacri­fice, la tor­tue divi­na­toire a été ensuite choi­sie en rai­son de l’a­na­lo­gie de la forme de sa cara­pace dont le bom­bé était une image de la voûte céleste et la base car­rée celle de la Terre. Les signes n’é­taient donc plus un mes­sage des esprits de la nature ou des ancêtres, mais la pro­jec­tion orga­ni­sée du macro­cosme vers le micro­cosme de la plaque osseuse. Donc à ce stade non plus le hasard n’é­tait pas convo­qué.

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Achil­lea mil­le­fo­lium L.

Vinrent ensuite les baguettes… Rap­pe­lons qu’entre temps les fis­sures divi­na­toires avaient été rame­nées à quelques formes géné­riques, agglo­mé­rées ver­ti­ca­le­ment en hexa­grammes de chiffres. Ces chiffres selon qu’ils étaient pairs ou impairs furent ensuite asso­ciés aux qua­li­tés yin ou yang.
Comme son nom l’in­dique l’a­chil­lée mil­le­feuille génère à par­tir d’un “tronc” unique, une mul­ti­pli­ci­té de rami­fi­ca­tions. Nous retrou­vons ici la diver­si­té des cir­cons­tances par­ti­cu­lières au sein d’un flux unique. Cela est repris par le pre­mier geste du rituel : du paquet ini­tial de 50 baguettes (5 x 10 repré­sen­tant 大 衍 dà yǎn : le grand déve­lop­pe­ment) on en extrait une sym­bo­li­sant le flux unique et l’on crée ain­si un dés­équi­libre et une imper­fec­tion dyna­mi­sante : lors de la sépa­ra­tion en deux paquets des 49 baguettes res­tantes il y a aura obli­ga­toi­re­ment un aspect yin (pair) et un aspect yang (impair).

Le Yi Jing : géné­ra­teur aléa­toire de réponses ? (1/6)

Le Yi Jing : géné­ra­teur aléa­toire de réponses ? (3/6)

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