Deux­ième volet de “Deux artistes inspirés par le Yin Yang ?”

Mau­rits Cor­nelis ESCHER

M.C. ESCHER (1898–1972) est sans con­teste pos­si­ble l’artiste le plus inspiré au niveau de la tran­scrip­tion graphique des para­dox­es en tous gen­res. Ses dessins et gravures, tou­jours struc­turés dans une pré­ci­sion math­é­ma­tique éton­nante, et d’une remar­quable esthé­tique, nous plon­gent dans des univers impos­si­bles qui stim­u­lent notre men­tal sans qu’il soit pos­si­ble à ce dernier d’y trou­ver une quel­conque logique. Visuelle­ment, les dessins de Esch­er se com­por­tent, vis à vis de nous, à la manière des Koans du Zen.
Par­mi ses pro­lifiques créa­tions j’en ai choisi trois qui me sem­blent impor­tantes car elles arrivent, à mon avis, à tran­scrire visuelle­ment cer­taines don­nées abstraites con­cer­nant le Yin/Yang.

Mains dessi­nant (1948)

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Deux mains se dessi­nent l’une l’autre, s’en­gen­drant toutes seules sans aucune inter­ven­tion extérieure, per­pétuelle­ment, sans qu’il nous soit pos­si­ble de savoir quand cet état de fait a com­mencé. Sup­p­ri­mons une main et l’autre ne peut plus exis­ter. Bien qu’in­ter­dépen­dantes, cha­cune a son autonomie et un car­ac­tère qui lui est spé­ci­fique. Leurs com­mence­ments (manch­es et poignets) sont indis­tincts et à peine esquis­sés par leur con­sœur respec­tive. Nous voilà donc tout à fait dans le Yin/yang (qui appa­raît en fil­igrane).

MCE2

Air et Eau (1938)

MCE3

Voilà bien une œuvre remar­quable !
Tout en bas, nageant dans des eaux som­bres, un pois­son blanc voit ses con­frères se stylis­er, s’épur­er pour finale­ment céder leur place (dans leurs con­tours) à une nou­velle forme de vie sim­ple, des oiseaux som­bres volants, dont les détails devi­en­nent de plus en plus pré­cis, for­mant au final une oie en plein vol sur un fond de ciel clair.
Nous voyons ici trois stades impor­tants du proces­sus Yin/Yang : le Yin du bas (pois­son, eaux, pro­fondeurs som­bres…), stade “hiv­er” des éner­gies, remonte et atteint une tran­si­tion hor­i­zon­tale mélangée (sur­face des eaux, hori­zon…), car­ac­téris­tique des saisons de même nature (mélangées), aux équinox­es (print­emps et/ou automne), et atteint au final la posi­tion haute et lumineuse de l’oiseau dans son élé­ment air, Yang.
Le pas­sage d’un stade à l’autre se fait imper­cep­ti­ble­ment et dans une sorte de douceur remar­quable où, de par les jonc­tions par­faites entre les deux ani­maux, le men­tal ne peut se fix­er à la fois sur le pois­son et l’oie, l’oblig­eant par là, dans cette tran­si­tion équinox­i­ale, à faire un choix, celui de mon­ter ou de descen­dre (jeune yang et jeune yin).
Il est à remar­quer (que ce soit l’oie ou le pois­son) que même dans les posi­tions extrêmes l’amorce de l’une ou de l’autre forme de vie est présente, tel le Yin dans le Yang et récipro­que­ment.

Bond of Union (1956)

MCE4Quant à cette œuvre, je la réserve pour la fin, car découper ain­si les êtres en six niveaux, cela me fait bien sûr penser aux hexa­grammes du Yi Jing…

Deux artistes inspirés par le Yin Yang ? (1/3)

Deux artistes inspirés par le Yin Yang ? (3/3)

CRÉDITS IMAGES : M.C Escher.