2 – Distinctions

近取諸身,jìn qǔ zhū shēn

Il contem­pla et dis­cer­na en lui-même pour ce qui était à proxi­mi­té,

遠取諸物, yuǎn qǔ zhū wù

et par­mi les dix mille êtres pour ce qui était dis­tant.

distinction

qǔ zhū

Les deux lignes sui­vantes ont-elles aus­si une struc­ture iden­tique : leurs seconds et troi­sièmes mots “取諸qǔ zhū“sont les mêmes : “取qǔ” a le sens de “prendre, sai­sir, choi­sir, adop­ter (un point de vue)” mais éga­le­ment celui de ” Être dis­tant de ; être sépa­ré de ; être éloi­gné de”. “諸zhū” signi­fie à la fois “tous”, mais aus­si “poser une dis­tinc­tion ; dis­tin­guer ; sépa­rer”. “取諸qǔ zhū” exprime donc que le sujet consi­dé­rant l’ob­jet de son atten­tion dans sa glo­ba­li­té, en dis­tingue les dif­fé­rences.

Les pre­miers mots de chaque ligne, “近jìn” et “遠yuǎn”, signi­fient res­pec­ti­ve­ment “proche” et “loin”. La clé de cha­cune de ces deux phrases est donc dans leur der­nier carac­tère :

“身shēn” fait réfé­rence soit au corps humain , soit à soi-même. “物wù” cor­res­pond aux “dix mille êtres”, tout ce qui existe natu­rel­le­ment.

Li ZhongyuanPuis­qu’il appa­raît de plus en plus clai­re­ment que les notions-clés trai­tées ici sont “contem­pla­tion, dis­cer­ne­ment, imi­ta­tion” men­tion­nons pour le plai­sir une des qua­li­tés fon­da­men­tales de la cal­li­gra­phie chi­noise : “取象qǔ xiàng”“savoir cap­ter les figures dyna­miques du réel pour les trans­crire en signes par le pin­ceau”. …Cette expres­sion est com­po­sée des deux carac­tères abor­dés plus haut : “取qǔ sai­sir“et “象xiàng phé­no­mène”.

 

3 – Conception

於是始作八卦   yú shì shǐ zuò bā guà

C’est ain­si qu’il conçut les huit tri­grammes

Les deux pre­miers carac­tères “於是yú shì” signi­fient “c’est pour­quoi”. Mais il faut remar­quer que “於yú” indique une loca­li­sa­tion, “un posi­tion­ne­ment par rap­port à autre chose” et que “是shì” signi­fie  “cor­rect, exact, juste”. Il se com­pose du soleil, la lumière “日 rì”, sur la rec­ti­tude “正 zhēng”. Il y a donc le sens de se mettre en accord avec les astres, avec le lumi­neux.

Les deux carac­tères sui­vants “始作shǐ zuò“signi­fient “être le pre­mier à faire quelque chose”. “始shǐ” veut dire “ori­gine, com­men­ce­ment”. Sa com­po­sante de gauche est la clé de la femme. Celle de droite désigne les six étoiles de la Grande Ourse et repré­sente éty­mo­lo­gi­que­ment un souffle exha­lé par la bouche : dire ; expri­mer. Cette créa­tion est donc l’ex­pres­sion, l’ex­pi­ra­tion fai­sant suite à la récep­tion “fémi­nine” d’une ins­pi­ra­tion céleste. Il s’a­git ain­si davan­tage d’une concep­tion (au sens chré­tien du terme de récep­tion de l’in­flux divin) que d’une créa­tion.

“作zuò” indique lui aus­si le “com­men­ce­ment”, mais contient de plus la notion de fabri­ca­tion. Sa clé de droite est est celle de l’homme et mani­feste donc la trans­po­si­tion sur le plan humain. Celle de droite donne la notion de pro­duc­tion (tra­vail) et d’in­ven­tion mais éga­le­ment le sens d’é­vé­ne­ment (“se” pro­duire) et de sur­gis­se­ment.

以通神明之德,yǐ tōng shén míng zhī dé

s’é­tant péné­tré de la clar­té du Ciel et de la Terre et ins­pi­ré de leurs ver­tus

baguatian“以yǐ” indique une “consé­quence : à par­tir de, le second temps d’un rituel”.

“通tōng” exprime une com­pré­hen­sion claire et pro­fonde, une péné­tra­tion sans entrave, l’i­déal du sage : la com­mu­ni­ca­tion pro­fonde avec les dix mille êtres.

shen mingLes deux mots sui­vants “神明shén míng” dési­gnent les esprits, la lumière spi­ri­tuelle du Ciel et de la Terre. “神 shén” cor­res­pond aux puis­sances au-delà du Yin/Yang, ani­ma­tion céleste qui pénètre les êtres humains et lui pro­curent la lumière, “明míng”. Il est com­po­sé à gauche de “示shì” qui veut dire “mon­trer” et repré­sente les sym­boles dans le ciel (soleil, lune, étoiles) dont l’ob­ser­va­tion per­met de déduire les chan­ge­ments pour l’homme, et à droite de “申shēn” qui exprime à la fois la secon­da­ri­té, la clar­té, le lien et le déploie­ment. “明míng”, le second mot, veut dire “lumière, briller, éclai­rer” mais aus­si “clair­voyance”. Le carac­tère montre le soleil et la lune ou (selon le Shuo Wen) la lune éclai­rant la fenêtre. Dans l’un et l’autre cas il s’a­git d’un éclai­re­ment : la lune est le reflet du soleil, mais sa lumière péné­trant la fenêtre illu­mi­ne­rait ce qui était clôt et donc obs­cur.

“德dé” est com­mu­né­ment tra­duit par “ver­tu, éthique” contient éga­le­ment les notions d’in­flux, d’in­fluence (de la nature), de s’ac­cor­der et d’é­lé­va­tion.

Divi­na­tion et Vision juste (8/12)

Divi­na­tion et Vision juste (10/12)

CRÉDITS IMAGES (DANS L’ORDRE D’AFFICHAGE) :  Pierre Lautier / ALAIN LEROY / Li Zhongyuan / ALAIN LEROY