Xuë wu : Le Yi Jing Noir (2/4)

par

Explo­ration du brouillard

Les termes Xuë wu signi­fient « étude ou explo­ration du brouillard ».

Son histoire

Selon la tra­di­tion, l’au­teur en serait le « Gar­dien de la Porte », un per­son­nage mythique connu comme le gar­dien du poste fron­tière Sino Tibé­tain qu’aurait fran­chi Lao Tseu en che­vau­chant un tigre. Cet homme aurait inci­té l’ar­chi­viste en fuite Lao Tseu qui quit­tait le pays, à rédi­ger ce texte majeur de la tra­di­tion chi­noise qu’est le Dao Dë Jing. Ce Gar­dien de la Porte aurait ulté­rieu­re­ment rédi­gé le Xuë Wu.

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Lors­qu’on revient sur la pre­mière par­tie com­po­sée de 16 pro­po­si­tions, il est aisé de relier la pro­po­si­tion 1 et la seconde aux concepts habi­tuel­le­ment attri­bués aux registres 1 et 2 du Yijing clas­sique :

1 – QIAN Ciel (en esprit), Elan de créa­tion,

1 – Peut-être avez-vous sou­hai­té avoir des enfants ? Si oui, exa­mi­nez les rai­sons de ce sou­hait dans leur tota­li­té. Sinon, exa­mi­nez aus­si vos rai­sons.

2 – KUN Terre(en esprit), Accueil Récep­tif (tein­té d’un peu de culpa­bi­li­té dans le Xuë wu).

2 – Sans égoïsme, vous vous êtes inquié­té, attris­té pour autrui. Vous vous êtes mis à sa place, vu à sa place, vous étiez sur le moment, cette autre per­sonne.

Une intros­pec­tion réflé­chie nous conduit faci­le­ment à la cer­ti­tude de l’a­na­lo­gie entre le texte « clas­sique » et le Xuë Wu Yijing Noir pour les pro­po­si­tions de 1 à 16 et la plu­part des sui­vantes :

16 – Prendre des risques inutiles est fou. N’est-il pas nor­mal, dans ces condi­tions, que vous aviez par­fois ten­té de faire jus­tice (la mal­veillance dirait : de nuire) sans risque ?

Ce 16 du Xuë wu pro­pose une étude cri­tique d’une action que nous aurions pu com­mettre sous l’in­fluence d’un enthou­siasme inadap­té ou exa­gé­ré, ce qui est au fond l’am­biance du registre 16 du Yijing clas­sique : YU.

Dans les 16 nou­velles pro­po­si­tions qui suivent cer­taines peuvent être faci­le­ment reliées au Yijing clas­sique. Par exemple la 18 à ce qui est cor­rom­pu, la 20 avec le regard loin­tain du hibou, mais pour ce qui est du 19 de l’ap­proche, le lien est par­ti­cu­lier, ori­gi­nal, mais réel.


Xuë wu : 2ème PARTIE du texte

Dans la PRATIQUE de la MEDITATION du HIBOU ou de la CHASSE de la PANTHERE :

uti­li­sez les 16 pro­po­si­tions sui­vantes de 17 à 32 selon la méthode décrite au volet 1 du Xuë Wu

17 – Sans doute, dans le pas­sé, avez-vous pris de bonnes résolu­tions. Pou­vez-vous vous sou­ve­nir de quelques-unes, tenues ou non.

18 – L’être humain n’est que tard dans la Voie maître de ses pen­sées. En auriez-vous eu qui vous auraient, par la suite, sem­blé écoeu­rantes ?

19 – Mû par le salu­taire désir de rendre ser­vice, vous avez détruit ses convic­tions (ou illu­sions). Ce fai­sant, vous n’a­vez pas éprou­vé « l’âpre plai­sir » dont parlent les Anciens ? En ce cas, bra­vo !

20 – Il est bon, dit le Sage, dis­ciple de Kong tseu, de se fixer un modèle idéal. Vous êtes vous fixé un modèle… ou dix ?

21 – Que de pro­jets aban­don­nés par vous ! Il est sage d’a­ban­don­ner un pro­jet fou. Mais « fou » ne se pro­nonce-t-il pas, quel­que­fois, « dif­fi­cile » ou « pénible » ?    

22 – Il y a l’ap­pa­rence de la chose et la chose elle-même. La lettre et l’es­prit. Cela s’ap­plique à tout : la pudeur, l’hon­nêteté. Avez-vous le sou­ve­nir de confu­sion pos­sible ?

23 – Dans son char, le dément écrase le pas­sant et dit : il n’a pas souf­fert. Quant à sa pos­té­ri­té, elle est à naître. L’homme déta­ché est au-delà de SON « mal » ou de son « bien » mais non au-delà du bien et du mal d’au­trui selon les concep­tions d’au­trui. Res­pec­tant le pas­sé, il pré­pare par cela même l’a­ve­nir. N’au­riez-vous pas quelque sou­ve­nance per­son­nelle d’une cer­taine légè­re­té d’actes ou d’in­ten­tion vis à vis de cet autrui à venir qu’est la pos­té­ri­té ?

24 – L’âge sclé­rose. Bien des per­sonnes âgées vous ont paru, à juste titre, peu com­pré­hen­sives à l’é­gard de l’être jeune que vous étiez. Que pen­sez-vous de l’at­ti­tude de la géné­ra­tion nou­velle vis-à-vis de vos contem­po­rains ?

25 – Vous avez dit du bien d’au­trui sans pen­ser tou­jours exacte­ment ce que vous disiez. La poli­tesse est une belle ver­tu. Et si rare !

26 – Cela arrive à, tous : vous vous êtes trou­vé en posi­tion d’in­fé­rio­ri­té devant autrui. Qu’a­vez-vous, alors, pen­sé de cet autrui ? Et qu’a­vez-vous res­sen­ti ?

27 – Il a dû vous arri­ver – cher­chez bien – de dépendre, pour votre sub­sis­tance, d’une ou de plu­sieurs per­sonnes autres que vous–même. Vous avez éprou­vé un vif sen­ti­ment de recon­nais­sance ? Rien d’autre ?

a noir28 – Il est humain d’é­prou­ver des « sen­ti­ments exces­sifs ». Mais ce mot « sen­ti­ments » suf­fit-il ? Le corps ne par­ti­cipe-­t‑il pas à tout ce qui passe la mesure ?

29 – Un peu de pru­dence est ver­tu. Vous est-il arri­vé de pra­tiquer une immense ver­tu ?

30 – Beau­coup de cou­rage est aus­si ver­tu. Si ce cou­rage est rai­son­né. Sou­ve­nez-vous de vos actes de cou­rage. Et détachez­ en ce qui n’é­tait pas rai­son. Ni cou­rage.

31 – Une bonne pen­sée sexuelle met d’ac­cord le corps et l’es­prit – Avez-vous le sou­ve­nir de pen­sées – ou d’actes – avec accord impar­fait.

32 – « Le temps est la plus pré­cieuse des den­rées ». En ver­tu de cet adage, vous avez par­fois été excé­dé par la len­teur d’au­trui ou parce qu’un évé­ne­ment tar­dait à se pro­duire. Votre ardeur a fait que tout a été plus vite et de façon par­ti­cu­liè­re­ment satis­fai­sante. Cela s’est cer­tai­ne­ment tou­jours pas­sé ain­si ?


En quête de l’ombre de notre ombre

On a dit du Yijing qu’il était le grand livre du Yin. Cyrille Java­ry s’ap­puyant sur les idées de Jean Fran­çois Bille­ter l’a démon­tré.

Le Xuë wu pro­pose la quête de l’ombre de notre ombre, d’un mes­sage déli­vré à la fois par le conscient mais aus­si par notre sub­cons­cient, sans le for­cer, lais­sant remon­ter ce qui est mûr, presque natu­rel­le­ment.

Il rend hom­mage au texte ori­gi­nel par une uti­li­sa­tion au cœur de la qua­li­té Yin !

Il est remar­quable que la ver­sion pro­po­sée ici pour les per­sonnes qui ne suivent pas l’é­tude du Tchan, entraîne vers une réflexion sur la valeur uni­ver­selle de nos actes, qui ne vise pas à para­ly­ser, face aux éven­tuelles consé­quences, mais plus à éveiller la conscience et éven­tuel­le­ment à déga­ger le pra­ti­quant des culpa­bi­li­tés oppres­santes mais nor­males, de façon à le rendre libre.

La visée pra­tique de cette méthode saute aux yeux, non pas par un usage divi­na­toire du Yijing, mais bien plu­tôt d’un usage trans­for­ma­teur de la per­sonne.

En cela le Xuë wu se relie bien à la sagesse asso­ciée tra­di­tion­nel­le­ment comme une valeur essen­tielle du texte du Yijing clas­sique.

Xuë wu : Le Yi Jing Noir (1/4)

Xuë wu : Le Yi Jing Noir (3/4)

CRÉDITS IMAGES (DANS L’ORDRE D’AFFICHAGE) : domaine public / RAMÓN HERMOSÍN VALIENTE