Proposition

Serait-il pos­si­ble (sans la renier pour autant) d’aban­don­ner ponctuelle­ment la vision saison­nière du sys­tème cyclique ?  Serait-il pos­si­ble de procéder au même élar­gisse­ment qui fait s’é­manciper la notion de momen­tum du strict cadre tem­porel ? Il y aurait ain­si ouver­ture au Change­ment “vari­a­tion énergé­tique per­me­t­tant de pass­er d’un point d’équili­bre à la rup­ture de cet équili­bre”.

Une bonne fausse bonne idée

Serait-il alors pos­si­ble de met­tre en rap­port les 4 vari­a­tions graphiques, décrites au début de l’ar­ti­cle, à ces 4 grandes con­fig­u­ra­tions-type, à ces 4 super-mod­èles ?

On pour­rait par exem­ple com­mencer par associ­er la con­ti­nu­ité du trait plein avec le mod­èle « Equi­li­bré »… Le trait brisé cor­re­spondrait-il alors au mod­èle “Alter­nance” ? Et sur quelles bases graphiques asseoir les deux autres super-mod­èles “Chao­tique” et “Com­plexe”?

Notre ten­ta­tive de cloi­son­nement doit cepen­dant s’ar­rêter là : ce qu’il y a de remar­quable dans la divi­sion de l’an­née en saisons, c’est la taille iden­tique de cha­cune d’elle. Ici ce coup de génie ne sem­ble pas fonc­tion­ner… La répar­ti­tion en 4 super-mod­èles n’est en effet pas fondée sur une mul­ti­pli­ca­tion binaire telle que celle pro­duite par l’alter­nance jour-nuit. Rien ne prou­ve qu’à ces caté­gories cor­re­spon­dent  la même pro­por­tion de cas de fig­ures théoriques. Pata­tras…

Cepen­dant rien n’empêche de ten­ter de plac­er cha­cun des hexa­grammes ou traits dans l’un ou l’autre de ces super-mod­èles. L’hexa­gramme 52, avec la notion d’«Immobiliser son arrêt”, pour­rait con­stituer un début assez facile…

Reste par con­tre la lim­i­ta­tion qu’in­duit une représen­ta­tion du monde exces­sive­ment cen­trée sur l’alter­nance : du point de vue de la mod­éli­sa­tion cer­taines trans­for­ma­tions sont “ori­en­tées cycle”, mais d’autres appar­ti­en­nent davan­tage aux champs de l’équili­bre, de l’aléa­toire ou du com­plexe.

Un des apports majeurs que l’on doit au Cen­tre Djo­hi et à Cyrille Javary, c’est leur acharne­ment à  enlever à l’hexa­gramme de per­spec­tive son car­ac­tère unique­ment pré­dic­tif. On a en effet, en occi­dent au moins, eu longtemps ten­dance à le lim­iter à l’ex­pres­sion du futur de l’hexa­gramme de sit­u­a­tion. Cela avait pour effet d’oblitér­er la mise en relief et la col­oration com­plé­men­taires à la déf­i­ni­tion de la sit­u­a­tion : cela enfer­mait dans un sché­ma causal­iste passé-présent-futur. L’ac­cent mis sur ce re-posi­tion­nement ren­force les pris­es de déci­sion respon­s­ables éclairées et réduit l’ap­proche pas­sive “div­ina­toire”.

Horoscope perspective

Ici aus­si c’est au niveau de l’axe du temps que l’on peut élargir : la vision des Trans­for­ma­tions avec les lunettes “4 super-mod­èles” per­met de s’é­manciper de ce qu’il peut y avoir de sclérosant dans le cadre, néan­moins génial, du principe d’alter­nance.

Perspectives

En résumé que nous pro­pose cette approche ? : 4 voies au lieu d’une…

Cyclique : le plus facile pour nous : il faut par­fois savoir atten­dre le moment oppor­tun et prof­iter de ce qui risque de ne pas dur­er. Les con­traires se génèrent mutuelle­ment et les saisons s’en­chaî­nent et revi­en­nent…

Equi­li­bré : “Ce qui ne change pas c’est que tout change en per­ma­nence”… Certes, mais sans aller jusqu’à l’im­mo­bil­isme, on peut souhaiter faire dur­er une sit­u­a­tion favor­able ou au con­traire apais­er une péri­ode tumultueuse. Il existe des points-leviers, des points de bas­cule pour prévenir la perte ou garan­tir la sta­bil­ité.

Com­plexe : La com­plex­ité d’une sit­u­a­tion, nos préjugés ou le peu d’in­for­ma­tions à notre dis­po­si­tion empêchent par­fois que l’on pose cor­recte­ment les ques­tions. Cela cor­re­spond par exem­ple aux tirages où le Yi Jing répond “à côté”.

Aléa­toire : le Yi Jing utilise l’aléa­toire pour déter­min­er… Mais il reste mal­gré tout des cas où l’aléa­toire con­duit à l’aléa­toire et où le résul­tat ne cor­re­spon­dra à rien d’i­den­ti­fi­able.

Bien enten­du, tout ce qui est souligné ici est déjà plus ou moins acces­si­ble par notre util­i­sa­tion habituelle  du Livre des Change­ments. Nom­breux sont les con­seils ou les ori­en­ta­tions que l’on pour­rait rat­tach­er à l’un des trois types de mod­èles dif­férents de la vision “Cyclique”. La ques­tion reste de mesur­er s’il n’y aurait pas struc­turelle­ment dans le Yi Jing ou dans notre façon de le lire une ten­dance à nous con­seiller par exem­ple plus sou­vent que de juste : “Il est pru­dent d’at­ten­dre, cela se pro­duira de toute façon tôt ou tard…”.

Pour finir, il est remar­quable que la prévi­sion par la Mod­éli­sa­tion, par la déter­mi­na­tion et le cal­cul sci­en­tifiques rejoigne sou­vent dans son approche celle des chamanes cal­cu­la­teurs de l’an­tiq­ui­té. On y démon­tre par exem­ple que la “ran­dom­iza­tion” (l’u­til­i­sa­tion d’in­for­ma­tions et de con­duites aléa­toires) peut pro­duire dans cer­tains cas de meilleures déci­sions que le choix raison­né…

D’où cette invi­ta­tion à recon­sid­ér­er nos modes de cal­cul !

Yin-Yang, momen­tums et mod­èles (2/3)

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