Puissance de la vision juste

Une vision faible, lim­itée et défor­mée est une mau­vaise vision.

Une vision juste est donc puis­sante, large et exacte.

La puis­sance de la vision juste nous per­met de voir loin et avec clarté. Péné­trante, elle ne se heurte pas à la sur­face des choses et accède directe­ment à la vérité. Ce qui lui per­met d’aller loin et pro­fond c’est la vigueur de la présence de celui qui regarde. Nous savons déjà que la vision exige la présence d’un obser­va­teur : en son absence pas de vision ; donc plus grande est la présence de l’ob­ser­va­teur plus forte est la vision. Ain­si la capac­ité d’at­ten­tion, de con­cen­tra­tion énergique à l’in­stant présent con­fère à la vision sa puis­sance.

Eye_Horus_Louvre_Sb3566La vision juste embrasse un large champ de vision. Elle est dégagée des lim­i­ta­tions physiques et con­ceptuelles. Nous savons déjà que la vision exige la présence d’un obser­va­teur : il ne s’ag­it donc pas ici de renon­cer à un “point de vue”. Ce dont il est ques­tion c’est de “renon­cer à renon­cer”… La con­cen­tra­tion évo­quée au para­graphe précé­dent est une mobil­i­sa­tion ; son effi­cience ne doit surtout pas être obtenue par le rejet de ce que l’on juge à pri­ori inef­fi­cace. Le mot-clé est ici : ouver­ture. Ouver­ture d’e­sprit ‑nous ne devons pas nous lim­iter à notre pro­pre vision des choses, fruits de nos expéri­ences ou appren­tis­sages passés‑, mais aus­si ouver­ture physique : tel l’archer qui vise avant de tir­er, de réalis­er son tirage : “Présence” par la sta­bil­ité de sa pos­ture et la con­cen­tra­tion de son regard ; “Ouver­ture” par l’é­carte­ment des bras qui pour mieux attein­dre le cœur de la cible, dégage son pro­pre cœur. Vis­er ain­si implique plus que l’œil et la tête : il y a élar­gisse­ment, lit­térale­ment embrasse­ment du corps et du cœur. De la même façon que la vision était péné­trante depuis la pro­pre pro­fondeur acquise par l’ob­ser­va­teur, c’est ici encore son pro­pre geste d’ou­ver­ture qui per­met de recevoir davan­tage d’in­for­ma­tions et d’en recon­naître le sens glob­al et l’u­ni­ver­sal­ité.

2014-09-14_18h34_25La vision juste est exacte. La pré­ci­sion et la rigueur de la pos­ture ou la démarche de celui qui observe le ren­dent incor­rupt­ible. Emprun­tant au bam­bou sa sou­p­lesse, il en obtient la rec­ti­tude. S’ef­forçant con­stam­ment, il sem­ble ne pas forcer. Affranchi des pro­jec­tions internes, il est immu­nisé con­tre les intru­sions et “con­serve son cap”.

Nous savons déjà que la vision exige la présence d’un obser­va­teur : la plu­part du temps et pour la plu­part d’en­tre nous notre regard est faible, lim­ité et défor­mé. Nous invi­tant à recon­sid­ér­er nos points de vue le Yi Jing nous per­met d’abord ponctuelle­ment, puis pro­gres­sive­ment et durable­ment d’amélior­er notre vision.

Pour être tout à fait com­plet il est néces­saire d’a­jouter que, tourné vers l’éveil, le boud­dhisme évoque une troisième forme de vision : la Vision Par­faite. Il s’ag­it de la vision juste à son plus haut niveau de réal­i­sa­tion, ray­on­nante de sagesse et de com­pas­sion. J’ai tris­te­ment l’im­pres­sion qu’elle n’est pas le sujet du Livre des Trans­for­ma­tions, mais cela est un autre débat, et sera cer­taine­ment l’ob­jet d’une toute autre série d’ar­ti­cles…

Revenant à notre livre, nous allons main­tenant plus pré­cisé­ment con­sid­ér­er com­ment le Yi Jing nous par­le de la vision, du regard et de l’œil.

Div­ina­tion et Vision juste (2/12)

Div­ina­tion et Vision juste (4/12)

 

CRÉDITS IMAGES (DANS L’ORDRE D’AFFICHAGE) :  MARIE-LAN NGUYEN / INCANUS JAPAN